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Verticalisation et spécialisation des plateformes : le renouveau du crowdfunding français

Verticalisation et spécialisation des plateformes : le renouveau du crowdfunding français

La fermeture de la plateforme Mymajorcompany qui a provoqué un véritable séisme au sein de la finance participative est l'occasion de faire le point sur l'état du marché.

« C’est un petit séisme dans le secteur très en vogue de la finance participative » déclarait Le Monde dans son édition du 12 février 2016 intitulée « Le crowdfunding français forcé de se renouveler pour éviter l’essoufflement » :


« MyMajorCompany, le pionnier du crowdfunding français, jette l’éponge » écrivait le grand quotidien, et de citer son fondateur Mickael Goldman: « à partir de mars, nous n’accepterons plus de projets sur notre plateforme. Nous arrêtons cette activité pour nous concentrer sur la production d’artistes … le marché n’a pas vocation à accueillir beaucoup d’acteurs. Au départ, la concurrence est saine, car elle permet de faire émerger le secteur, mais rapidement, elle oblige à se lancer dans une coûteuse course à la part de marché, ce que nous refusons . »


C'est donc la fin d'une histoire qui avait pourtant bien commencé ! MMC fut un acteur pionnier en matière de crowdfunding, en proposant en 2008 les premières levées participatives de co-production musicale d’album en ligne. MMC, avec Ulule, KissKissBankBank, Babeldoor, Wiseed, Anaxago ont su ouvrir la voie, puis porter haut les couleurs de la finance participative et les défendre auprès des pouvoirs publics.


Si MMC a choisi de ne plus poursuivre l’aventure, les plateformes comme Ulule et KissKissBankBank constatent quant à elles un ralentissement de la croissance des volumes de collecte avec des taux de l’ordre de 15 à 20% en 2015 après avoir doublé l’année précédente. De plus M. Ricordeau, co-fondateur de KissKissBankBank, regrette dans l’article du Monde « que seulement huit internautes sur dix ne donnent qu’une fois. Les internautes ne viennent pas spontanément financer la créativité. » Arnaud Poissonnier, fondateur du site de microcrédit Babyloan explique : « Contrairement à ce qu’on pense, la communauté ne contribue que très peu au financement des dossiers en ligne. Pour continuer à croître, les plateformes doivent donc agréger un maximum de projets.»


Le marché serait-il en train de s’essouffler ?


Faut-il penser tout comme le fondateur de MMC Mickael Goldman que « le marché n’a pas vocation à accueillir beaucoup d’acteurs » ?


Ce n’est pas ce que nous constatons. Bien au contraire car nous voyons émerger au côté des acteurs historiques de plus en plus de plateformes « verticales » de taille certes moins importante mais développant un service différenciant sur un secteur géographique, une communauté ou une thématique donnés, en direction de porteurs de projets de mieux en mieux informés qui attendent avant tout d’être distingués, accompagnés et visibles.


Nous accompagnons quotidiennement de nouveaux opérateurs qui font un choix inverse de celui de MMC et qui se positionnent de façon verticale sur un segment de marché qu’ils connaissent bien.


Certains sont déjà rentables, quelques mois seulement après leur lancement, d’autres profitent de la croissance exponentielle du secteur, d’autres enfin se développent en complément de leur activité principale et s’appuient sur le crowdfunding pour ses leviers en matière de visibilité et de communication, ou pour l’animation de leur communauté.


A l’époque où MMC s’est lancée, aucun opérateur marque blanche n’existait et créer une plateforme complète était extrêmement coûteux. Toutes les plateformes qui ont choisi de se développer par elles-mêmes, et notamment les premières comme MMC, ont non seulement eu à supporter des coûts d’investissements de plusieurs centaines de milliers d’euros, mais elles ont dû ensuite faire face à des coûts de maintenance élevés et investir toujours plus dans de nouvelles fonctionnalités. Il était alors impératif de se lancer dans cette « course à la part de marché » pour espérer atteindre des volumes suffisants nécessaires pour qu’un site puisse couvrir ses frais avant même d’être rentable, la course au volume impliquant d’embaucher des ressources à l’édito ou la communication, donc d’augmenter les charges. Un positionnement généraliste était pratiquement incontournable à l’époque du lancement de la plateforme de MMC.


Aujourd'hui, si un opérateur très bien positionné dans la domaine de la musique souhaitait lancer sa plateforme de crowdfunding, il aurait avec une solution marque blanche telle que la nôtre la possibilité de choisir de rester centré sur son cœur de métier, et de ne cibler "que" les millions de fans que ce sujet fédère. Là où il est difficile pour une plateforme généraliste d'avoir une politique tarifaire plus élevée que celle de ses concurrents directs (les frais de MMC étaient plus élevés que sur les autres pure player), un acteur spécialisé, bénéficiant d'un bon ancrage local, d'une forte expertise sur son secteur ou d'un bon réseau de partenaires, peut facilement justifier de prélever des commissions un peu plus élevées qu'ailleurs, du fait de la qualité et la pertinence de son service d'accompagnement et d'intermédiation.


C’est d’ailleurs ce que nous observons chez nos clients: la plupart inventent de nouveaux modèles d’affaire, à partir du panel d'outils que nous proposons (frais de dossier, frais de succès, pourboires...) : la course au volume n'est plus une voie incontournable pour qu'un site puisse devenir rentable.


Deux types de plateformes ont de l’avenir et seront peut-être en mesure de créer de sérieuses difficultés aux plateformes généralistes.


Les plateformes « verticales », aux thématiques clairement identifiées et/ou à l’identité bien marquée - par exemple : Credofunding (communauté catholique), Easiup (communauté musulmane), Gwenneg (Région Bretagne), Provence Booster (région Provence), Monacocrowdfunding, Kaalisi (bassin méditérannéen), OZE (département de la Manche), Wellfundr (la santé), MyAnnona (entrepreneuriat féminin), Babeldoor (Solidarité), et bien d'autres encore, des plateformes qui se développent fortement et qui sont promises à un bel avenir. Le taux de succès des campagnes de ces plateformes est souvent très supérieur à la moyenne des plateformes généralistes ; cela se comprend car elles font appel aux valeurs fondamentales du crowdfunding (proximité, confiance, identification..) et rendent surtout des services différenciants à leurs utilisateurs (plus de visibilité dans un catalogue de projets mieux ciblés, une communication personnalisée, des conseils…). Certaines d’entre elles développent des offres innovantes multi-projets (comme Gwenneg par exemple) mixant dons/prêts/titres. A l’inverse des plateformes généralistes, nous constatons également une fidélité beaucoup plus forte des donateurs / prêteurs / investisseurs et un apport important de la communauté aux campagnes.


Le crowdfunding est également en train d’intéresser fortement les organisations (non seulement les banques, les assurances mais également les entreprises, fondations et collectivités territoriales) qui voient dans le crowdfunding, un nouveau canal de distribution, une nouvelle façon de satisfaire ses clients, ou encore une nouvelle façon d’entrer dans l’ère du digital (cf. les amis de la fondation du club Méditerranée ou tel grand cabinet d’expertise comptable).


Alors que le marché du crowdfunding est encore tout jeune, il est déjà en train d’aborder une profonde mutation. Le modèle historique des plateformes qui voient comme principale stratégie la course à la taille est en train de s’essouffler. L’émergence de plateformes verticales et ciblées sur des communautés est maintenant possible grâce à des offres de solutions comme Mipise. Ces plateformes, parce qu’elles sont mieux à même de répondre aux problématiques des porteurs de projets et aux attentes des donateurs / prêteurs / investisseurs de leur communauté, permettent de pénétrer des marchés là où les plateformes généralistes ont moins de légitimité.


Notre vision, c’est que le marché de la finance participative est encore loin d’être saturé. Tout au contraire il continue de s’étendre rapidement. Simplement les plateformes historiques profitent moins de son extension.


« Le crowdfunding français » a d'ores et déjà commencé sa mutation avec l’émergence des plateformes verticales et l’arrivée du crowdfunding dans les organisations.